Lagadère Publicité l’affirme, ELLE est la marque du féminin et se vend comme telle, sur des territoires de plus en plus nombreux.
Il y a d’abord eu les déclinaisons en magazine de déco, avec ELLE Decor, et en magazine pour ado avec ELLE Girl. La marque s’est encore étendue en lançant ELLE Passions, une ligne de vêtements.
Même chose chez les lad mags, puisque Dennis Publishing licencie sa marque Maxim à des steak-houses. Tant que la marque s’étend sur son territoire, son propriétaire ne peut que se frotter les mains en empochant les royalties et en regardant sa marque gagner en visibilité.
Avec l’élection présidentielle, ELLE a franchi un pas supplémentaire. Le 5 avril dernier, le magazine invitait les principaux candidats à Sciences-Po pour les faire parler des femmes, lors du Forum ELLE-Ce que veulent les femmes.
L’objectif marketing est clair, il s’agit d’étendre la marque sur le territoire des valeurs, en l’associant aux promesses féministes de la campagne. ELLE, la marque du féminin engagée. Nul doute qu’avec un positionnement pareil, les lectrices feront encore plus confiance au titre, augmentant d’autant la valeur de la marque.
Mais la politique reste un peu moins prévisible que la mode. En lieu et place des discours policés des candidats présentables, c’est Le Pen qui a fait l’évènement. Trop content d’avoir en face de lui un public hostile, le finaliste de 2002 a réussi à monopoliser l’espace médiatique du Forum ELLE grâce à quelques commentaires pour le moins irrévérencieux.
Au lendemain de l’évènement, LCI, Le Monde ou 20 minutes faisaient la part belle à l’intervention de Le Pen. Quant à ceux qui n’en ont pas parlé, comme Libération, les commentaires se sont chargés de le faire revenir au cœur du débat.
Pour une marque qui affirme fédérer ses lectrices autour de ses valeurs fondatrices de modernité, d’ouverture et d’optimisme, c’est raté. D’autant plus que d’engager une marque dans un combat moral, à l’instar de The Body Shop ou de United Colors of Benetton, nécessite un minimum de crédit. Or Lagardère n’est pas précisément exempt de pressions politiques.
ELLE aurait pu s’associer au Festival de l’andouillette et du vin blanc de Clamecy que le résultat aurait été moins désastreux.
Nicolas Kayser-Bril est étudiant en économie des médias. Il blogue sur Window on the Media et prépare actuellement une étude des médias postsoviétiques avec le projet Vostok2.0