L'Observatoire des médias

Matin plus, le mashup de Bolloré et du Monde distribué ce matin

villeplus-implantation"Moi j'espère qu'il y en aura encore plein, histoire qu'ils étouffent, qu'il n'y ait plus assez de pub pour tout le monde" confie le responsable d'une maison de la presse, au métro Alexandre Dumas, ce matin. Ses clients sortent du métro, et remontent la rue de Bagnolet pour aller à leur travail. Ils passent donc d'abord sous les parasols rouge socialiste de Matin plus et bleu UMP de 20 Minutes. Ce matin, à 9 heures et demie, il n'y avait plus de 20 Minutes dans le présentoir bleu, mais deux jolies demoiselles toutes de rouge vêtues étaient là pour distribuer le nouveau produit de Bolloré avec Le Monde inside. L'une n'a pas mis sa casquette Matin Plus. L'autre me donne mon exemplaire, en m'avouant ensuite que j'arrive trop tard pour les galettes bretonnes.

Et oui, Bolloré est breton.

Des chiffres : Un format demi berlinois, un tirage de 350 000 exemplaires avec une certification OJD en cours, 32 pages quadri sur un papier recyclable (et pas recyclé?) de 52 grammes, distribué à Paris et en région parisienne du lundi au vendredi à partir de 7h par 300 colporteurs via , une société dont Bolloré a acquis 100% il y a peu.

Un pitch : "Un journal qui fait la pédagogie de l'information avec la signature du Monde et de
Courrier International" nous dit le brief publicitaire.

Le web : un gros portail Bolloré Intermedia est en préparation, il sera en ligne à la rentrée, lâche la régie pub. Donc pas de couplage web-papier pour le moment. Il y a une page web, où l'on peut télécharger le journal en PDF. Avec un petit raté ce matin, le journal téléchargeable n'était pas au bon format, chose corrigée depuis.

Une phrase qui tue : lorsqu'on demande à la demoiselle qui distribue le journal Matin plus si les présentoirs sont les mêmes que Direct soir, elle répond : "non, mais les deux journaux sont faits par la même agence".

Des polices : pour ceux qui se posent la question des polices utilisées, il suffit de télécharger le fichier pdf du journal. Le titre a été réalisé avec différentes graisses d'Helvetica Neue LT, tandis que les articles réalisés par l'équipe du Monde sont titrés avec de la Swift Regular, une police qui n'est pas sans rappeler celle utiliser aujourd'hui pour les titres du Monde.

Le Monde est bien présent dans ce quotidien. Très présent. Trop? Le souci, c'est que l'on a l'impression que ce sont des pages froides. L'informatique du Monde aurait-elle créé dans une nouvelle rubrique intitulée Frigo pour Matin plus? Le Frigo, c'est là où l'on met de côté les articles. C'est comme les "brouillons" de Gmail, c'est là où on garde au chaud les pages froides. Bolloré voulait qu'il sorte le 6 février, parce que le 6, c'est bien. Pas le 8, le 6. Mais le 6, c'est le lendemain du grand oral de Sarkozy sur les ondes de TF1… et lorsqu'on s'intéresse à l'actualité, on a peut-être envie de savoir ce qu'en pense la rédaction de ce Matin Plus. Et là, patatras. Rien. Ou si, pardon, une "photolège". Une photo-légende, en page 12. Une photo AFP, une capture d'écran télé, mais le souci, c'est que la photo a été non seulement recadrée, mais aussi étroitisée. Un Nicolas Sarkozy anamorphosé. Beaucoup ont repris cette photo sans la rogner. Étrange décision de Dan Torres, ex directrice du service photo de Libération, qui officie désormais à la rédaction de Bolloré.
Le concurrent, 20 Minutes, a bien joué en publiant en page "tv-médias" une photo présentant une maquette de travail du nouveau quotidien du matin, qui ne laisse apparaître que le PLUS du titre, là où l'article d'Olivier Costemalle dans Libération est illustré par une photo de la première distribution de 20 Minutes à Lyon. Vous pouvez retrouver l'article de Raphaëlle Baillot ici.

Coup de fil à Jean-François Porchez, typographe, auteur de la police de caractère "Le Monde", utilisée pendant des années pour le quotidien.

les pages faites par Le Monde : "cela me fait penser au Monde 2 à ses débuts, ou alors pages Grand Angle de Libération, mais c'est vrai que l'on dirait des pages froides."

les pages pleines de photo : "cela ressemble au journal mon quotidien que lit mon gamin de 11 ans. Si tu as envie de lire tu peux, mais tu peux aussi ne regarder que les images."

le mélange des genres entre les pages du journal : "cela donne l'impression que les journaux sont des publicitaires eux mêmes. On sent que c'est la salle de réunion des pontes de la presse: ce sont des concepts trop bruts appliqués trop vite, sans échanges, pour que cela puisse fonctionner."

le chemin de fer : "il n'y en a pas. Il y a une vraie lutte entre les doubles photo, les doubles brèves, et les doubles articles"

le mot de la fin : "les pages réalisées par le Monde donnent une caution, maintenant il va falloir voir si le gens ne s'y perdent pas."

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