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Prisa redresse ses comptes, mais la diffusion de sa presse papier s’écroule

Le groupe de médias espagnol Prisa, présidé par Juan Luis Cebrián, éditeur entre autres du quotidien El Pais, et par ailleurs actionnaire du Monde à hauteur de 12,8 %, a réussi ses derniers mois à alléger sa dette et à sortir la tête de l’eau, mais au prix de multiples cessions d’actifs stratégiques.

La vente de sa participation de 56 % dans le bouquet de télévision payante Digital+ au géant espagnol des télécommunications Telefonica pour 750 millions d’euros, ainsi que celle d’une partie de ses parts dans Mediaset Espagne (la filiale espagnole du groupe italien de télévision Mediaset), sans oublier celle de l’éditeur Alfaguara à Penguin Random House pour 72 millions d’euros ont considérablement réduit sa taille et son poids dans le monde des médias.

Malgré ses mesures, le groupe Prisa est toujours endetté à hauteur de 1,9 milliard d’euros, et son secteur presse papier quasi démantelé.

La diffusion de ses journaux n’a cessé de diminuer : le journal phare du groupe, El País, a vu ses tirages baisser de 43 614 exemplaires au premier semestre 2015, par rapport au premier semestre 2014. Sa section magazine a été pratiquement réduite à néant avec l’abandon de la publication de la version espagnole de Rolling Stone et de Cinemania, tandis que son journal économique Cinco Días, est en vente.

Durant la première moitié de 2015, El País, As (2nd quotidien sportif espagnol), et Cinco Días ont vu leurs ventes baisser de plus de 63 000 exemplaires par jour par rapport à la même période de 2014, aggravant une crise qui dure depuis plus d’une décennie et qui touche la quasi-totalité des journaux espagnols. En 2005, El País imprimait 453 000 exemplaires par jour, pour seulement 275.000 maintenant. L’année dernière encore, ses ventes ont chuté de 16%.

Cette baisse a naturellement affecté leurs revenus, qui ont diminué de plus de 10 millions d’euros pour les six premiers mois de l’année par rapport à 2014, et ce, malgré une augmentation des revenus publicitaires de 1,5 million, augmentation liée à la reprise économique de ces derniers mois.

Certains analystes de la presse espagnole attribuent également la chute des ventes d’ El País à l’arrivée d’Antonio Caño à la tête du journal en 2014: Le virage à droite imprimé à la ligne éditoriale n’aurait pas plu aux lecteurs traditionnels, et n’aurait pas réussi à capter l’attention des lecteurs plus conservateurs.


Une des grandes questions qui se posent à l’heure actuelle sur l’avenir de Prisa, est l’abandon du format papier au profit du tout numérique. Pour l’instant, les recettes générées en ligne ne représentent que 35% du total, mais avec une augmentation de 21,4% l’an dernier. L’objectif affiché d’Antonio Caño est d’atteindre 100 millions d’utilisateurs par mois pour 2016.

En attendant de voir si la stratégie Prisa pour atteindre cet objectif porte ses fruits,
et au-delà des mauvais résultats obtenus dans le domaine de la presse, il convient de noter que le groupe a réalisé un bénéfice de 10,68 millions d’euros au 1er trimestre, grâce à l’amélioration du marché publicitaire, au succès de son édition scolaire en Amérique du Sud et au contrôle des coûts dans ses filiales.
Mais, avec une dette de 1,9 milliard d’euros, l’avenir du groupe qui fêtera les 40 ans de la création d’ El País l’année prochaine reste très incertain.

 Anne GIRARD

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