Le principe des droits voisins des agences de presse et des éditeurs de presse, c’est-à-dire une juste rétribution par les géants du numérique des éditeurs et des journalistes pour les contenus d’informations qu’ils reprennent en ligne, a été adopté par le Parlement européen et les pays membres de l’Union européenne. Les droits voisins ont été votés par tous les groupes politiques et à l’unanimité par les deux chambres du Parlement français sur une proposition de loi sénatoriale portée par David Assouline. Les droits voisins sont soutenus et attendus par toute la profession et dans toute l’Europe pour mettre enfin un terme à la chute des revenus de la presse.
Pourtant , au mépris de ce consensus démocratique, la société Google a annoncé le 25 septembre qu’elle entendait se placer en marge du système et refuser d’entrer en négociations avec les éditeurs.
La France est le premier pays à transposer les droits voisins dans sa législation nationale. Cette décision montre donc que Google entend mener dans toute l’Europeune guerre de position pour tenter de fracturer lefront des éditeurs et de fragiliser la transposition dans les autres pays.
L’auteur et rapporteur de la proposition de loi, David Assouline, a très fermement dénoncé une attitude « qui relève d’une tactique délétère et dangereuse de la part de Google qui, plus que tout autre, devrait prendre conscience de l’importance de préserver la culture et la qualité de l’information dans les pays où il officie » . David Assouline a ajouté : « Il y aura des droits voisins et les géants du numérique feraient bien d’en prendre rapidement conscience pour créer dès à présent des relations harmonieuses et respectueuses avec les éditeurs. Toute autre attitude de leur part, en plus d’appauvrir leur offre, sera jugée sévèrement par les peuples et les gouvernements de l’Union européenne, qui sauront s’en souvenir à très court terme ».
Le rapporteur pour avis des crédits de la presse, Michel Laugier, s’est inquiété des conséquences de cette décision, « alors même que les pouvoirs publics et les éditeurs mènent à bien des réformes complexes, comme celle de la distribution, pour permettre à la presse de retrouver un équilibre financier nécessaire à son développement. «
Catherine Morin-Desailly, Présidente de la commission de la culture, de la communication et de l’éducation, a replacé ce débat dans le contexte plus large de la position hégémonique des géants du numérique dans l’accès à la culture, hors de tout contrôle démocratique. « Comme je le souligne depuis des années, l’Europe doit cesser de suivre une attitude naïve et prendre conscience que les intérêts de ces entreprises ne sont pas alignés sur les nôtres. La nouvelle Commission européenne doit prendre acte dès à présent de l’impossibilité de travailler en confiance avec des sociétés qui vendent en secret nos données personnelles pour des objectifs douteux, mais refusent de payer pour l’accès à l’information. »
La commission de la culture, de l’éducation et de la communication est présidée par
Mme Catherine MORIN-DESAILLY (UC ‑ Seine-Maritime)
M. David ASSOULINE (Socr ‑ Paris) est auteur de la proposition de loi et rapporteur du texte
Créateur et rédacteur en chef de L'Observatoire des Médias. Journaliste, consultant. Conseil strat. digitale. Intervenant : ESJ-CFPJ-IPJ-CELSA. Ex Libé, LePost.fr.
Ce qui se passe c’est que tous les modèles économiques basés sur le coût de la reproduction et la diffusion sont mis à mal. Le copyright n’existe pas et la copie est même le principe fondamental du principe du vivant et de la culture. Ainsi quand finalement les coûts de la reproduction tendent vers zéro il faut comprendre que c’est une bonne nouvelle. Alors c’est vrai, ça met en péril des entreprises qui ont un modèle traditionnel, mais d’autres peuvent émerger. Je suis personnellement gêné par l’idée de vouloir absolument protéger et avantager des entreprises contre d’autres. Quand en plus je remarque que ces entreprises à protéger relativement à une mission d’intérêt public très répétée rassemblent des « amis » structurels (mais aussi parfois bel et bien personnels) des élus à la tête des institutions de régulation, je suis suspicieux. Google me semble se conformer à des lois cybernétiques qui sont du même ordre que les lois physiques ; le web (rencontre de la documentation et de l’Internet) est sans doute un phénomène sous-estimé : l’apparition de l’oralité chez les hominidés a bien dû remettre en cause des intérêts personnels et des rapports de force, mais enfin heureusement que ceux qui savaient parler ne se sont pas fait exterminés par ceux qui ne savaient pas car aucun de nous ne serait là. Le web et le lien, 3è dimension de l’écriture, est sans doute fondamentalement humain et peut-être tout à fait plus précieux que n’importe quel modèle économique très éphémère à l’échelle humaine.