L’Observatoire des Médias a demandé à Jacques Rosselin, Directeur de l’EFJ et co-fondateur et ancien directeur de Courrier International de nous donner sa vision de l’avenir des médias en France en 2021.
Prédire est un exercice difficile, surtout quand il s’agit du futur dit-on. Et puis il y a cette foutue pandémie. Voici, en toute modestie donc, mes prédictions pour l’année 2021.
► Les médias d’information traditionnels vont investir massivement dans l’innovation éditoriale et lancer un vaste plan d’embauches.
► Le service public va renforcer son budget d’information au détriment des émissions de divertissement. Ses JT seront exclusivement consacrés à de l’enquête, à l’information internationale, notamment européenne. Les marronniers seront proscrits.
► La tendance dans toutes les rédactions sera au développement de services d’enquête où les journalistes auront le temps et les moyens de se lancer sur des sujets pendant plusieurs semaines voire plusieurs mois.
► Le gouvernement va lancer le projet d’un revenu minimum pour les journalistes titulaires d’une carte de presse, ce qui leur donnera plus d’indépendance et leur permettra de choisir plus librement le média pour lequel ils veulent travailler. Le financement sera assuré par la réaffectation des aides à la presse.
► Les journalistes vont se mettre sérieusement au code et aux algorithmes.
► Les journalistes « experts » en économie seront systématiquement deux en plateau, afin de favoriser la contradiction.
► Le nombre de directs face caméra devant un bâtiment (quai de gare, Élysées, bureau de vote, grandes surfaces, etc.), seront réduits au strict minimum pour des raisons sanitaires, surtout en hiver.
► La bourse disparaîtra des grilles de programmes radio et télé.
► L’utilisation de l’orthographe inclusive sera proscrite dans les médias d’information et passible d’une amende.
► Les médias écrits réembaucheront des correcteurs
► Un congé d’une semaine sera accordé à tous les journalistes pour former les élèves du primaire à l’information et aux médias.
► Plusieurs fondations destinées à financer l’information indépendante vont voir le jour grâce à une réforme de la fiscalité inspirée de ce qui se passe dans les pays scandinaves et aux États-Unis.
► Des écrivains, artistes et comédiens remplaceront les journalistes qui commentent les événements sportifs.
► On ne pourra plus être actionnaire d’un média d’information si l’on dépend économiquement de commandes publiques ou plus généralement de l’État pour son activité.
► L’usage de la clause de cession ou de conscience sera réformé. Ces clauses seront inapplicables dans le cas d’un média en liquidation ou en redressement judiciaire ou en cas de reprise du média par toute organisation qui a pour objectif l’indépendance des médias.
► Facebook et Google seront démantelés pour infraction au droit de la concurrence
► Jean-Pierre Pernaut investira dans un réseau d’information citoyen, couvrant toutes les régions et employant plus de 1000 correspondants locaux.
► Les journalistes du service public seront autorisés à être plus critiques à l’égard du pouvoir. Ils seront dispensés de suivre ou d’inviter des ministres à tout bout de champ et pourront se consacrer à des sujets plus utiles et plus passionnants.
► Les médias d’information en continu vont renoncer aux débats caricaturaux ou xénophobes et vont se recentrer sur l’enquête et les sujets de fond. Le CSA sera impitoyable à l’égard de tous les dérapages racistes ou machistes lors des émissions d’information.
► Il n’y aura plus d’experts non identifiés ou de lobbyistes non déclarés comme tels sur les plateaux de télévision.
► Les lois sur le secret des affaires seront abolies par le gouvernement qui sera désormais soucieux de combattre tout ce qui peut gêner le travail des journalistes.
► Les journalistes auront accès aux manifestations et pourront prendre des images sans se faire taper dessus.
Bon, c’était pour rire et rêver un peu… ! Mais ça fait du bien en ce début d’année chaotique.
Bonne année 2021 à tous !