Dans son édition d'hier, le magazine allemand Stern comparait Wikipédia au Larousse local en utilisant quatre critères : rigueur factuelle, mise à jour, complétude et clarté. Sans surprise, l'encyclopédie en ligne a gagné haut la main. On ne compte plus le nombre de comparaisons de ce type. Les résultats restent identiques et les journalistes s'étonnent à chaque fois que plusieurs millions d'experts soient plus compétents que quelques dizaines.
C'est de la philo pas chère : Si je peux modifier Wikipédia, mon crétin de voisin peut le faire aussi. Au final, la vérité obtenue ne représente que les opinions les plus largement partagées.
Il faudrait mener des études similaires sur les sites d'actualité. Les articles de Rue89 sont-ils plus inexacts que ceux du Monde ? Ceux de iNorden plus biaisés que ceux de Politiken ?
Sur deux critères au moins, mise à jour et clarté, les internautes perdent leur avantage. Malgré ça, le co-journalisme a toutes les chances d'obtenir de meilleurs résultats que le monojournaliste.
On sait que l'immense majorité des journalistes professionnels se disent de gauche. Dès lors, il est probable que l'information produite par tous ceux qui ne le sont pas soit considérée comme plus vraie par une plus grande part de la population. L'ouverture aux opinions permet d'améliorer la qualité des faits rapportés.
Chez Philippe Couve, Albert du Roy dit qu'il est illusoire de croire que l'on peut s'informer sans journalistes. L'illusion, c'est croire qu'un corps aussi homogène peut dicter une vérité à une société hétérogène.
La conséquence de ce mythe fondateur du journalisme moderne s'observe tous les trois mois, quand les groupes médias publient leurs résultats et annoncent les prochains licenciements.
Nicolas Kayser-Bril est étudiant en économie des médias. Il blogue sur Window on the Media et prépare actuellement une étude des médias postsoviétiques avec le projet Vostok2.0
Que d’arrogance dans votre écriture !
Ce cynisme en fin de texte me semble bien réducteur : si les mauvais résultats des groupes médias s’expliquent par un contenu ne correspondant pas aux lecteurs, ce n’est certainement pas parce que ce contenu serait biaisé à gauche !
D’abord le contenu à lui seul ne suffit sans doute pas à expliquer les mauvais résultats de la presse, et vous le savez mieux que moi.
Ensuite si une majorité de journalistes se dit de gauche, on peut quand même penser que ça ne se reflète vraiment pas dans le résultat imprimé !!
Je ne vous comprends pas très bien votre considération droite/gauche :) D’ailleurs qui dit que les contributeurs d’internet sont majoritairement de droite ? Qui peux prétendre qu’ils soient représentatifs du corps électoral ?
Cordialement
Jean-Baptiste Ingold
Un détail :), dans votre comparaison entre lemonde.fr et rue89.
Qui a dit que rue89 n’était pas écrit par des journalistes ? Il semble même que les blogs de rue89 sont validés par les journalistes !
Cependant, il est vrai que rue89 tente de suivre au plus prés les commentaires. Les journalistes descendent répondre aux commentateurs. Ils rectifient les éventuelles erreurs factuelles des articles. Ce fessant ils profitent peut-être mieux de l’intelligence collective des lecteurs.
Cordialement
Jean-Baptiste
Disclosure : Rue89 m’a modestement associé à leurs réflexions sur la gestion des commentaires (appelé réactions).
Un nouveau système doit entrer en production en début de semaine. Il met fin à la possibilité des commentaires anonymes. Et les journalistes pourront plus simplement mettre en avant les commentaires les plus pertinents. Un processus d’éditorialisation des commentaires que rue89 fessait déjà manuellement mais qui sera systématisé.
Le but est de tirer les commentaires vers le haut. En attendant une vraie gestion de communauté avec des « miles » en fonction de la participation à la communauté. Une fonctionnalité de Drupal (framework utilisé par rue89) qu’ils n’avaient pas encore exploitée.
http://www.rue89.com/2007/12/08/deces-annonce-du-courageux-anonyme-de-rue89
@seb
Merci pour le commentaire.
Effectivement, mon cynisme est réducteur. Mais comme dirait mon idole du moment, Nicolas Bouvier, il a l’avantage sur l’hypocrisie de faire un dupe de moins puisque je ne cherche pas à me duper moi-même.
Ce qu’on voit et ce qu’on en rapporte est *toujours* fonction de ce qu’on pense et de ce qu’on sait. Par conséquent, le biais des journalistes se reflète dans ce qu’ils écrivent.
Quand on se positionne, comme de nombreux titres, sur un segment plus large que les seuls Français de gauche, ce manque de diversité parmi les rédacteurs garanti l’aliénation d’une énorme part du marché.
@jb
Merci pareillement.
Sur Rue89, une équipe s’assure du respect de la démarche journalistique. Ensuite, l’ouverture aux contributeurs extérieurs permet de faire entrer des points de vue divergents (et pas qu’au niveau politique).
Vous avez cependant raison, l’exemple est mal choisi. Rue89 revendique une certaine subjectivité. Et ils ont raison. Plus facile d’affirmer ses opinions en ciblant ceux qui y adhèrent que de chercher à atteindre l’objectivité. C’est moins cher.
La presse la plus marqué idéologiquement est souvent plus profitable. Cf. le marché anglais, où la presse se porte très bien.
En tout cas, les historiques des modifications donnent une bonne idée du ‘mouvement’ derrière chaque page de Wikipédia…
je vous recommande l’un de nos post à ce sujet (Wikipédia et la guerre des ‘neutralisateurs’), où nous avons suivi les modifications de la Mise en Examen de Guillaume Dasquié, cas polémique s’il en est…
bref, la vérité est ailleurs comme dirait l’autre =)
MArtin !
http://www.themediafactory.fr
«Au final, la vérité obtenue ne représente que les opinions les plus largement partagées.»
Ce qui n’est pas souvent le cas. D’une part il y a les discussions sur les articles, mais surtout, les différentes opinions et thèses sont mentionnées.
« On sait que l’immense majorité des journalistes professionnels se disent de gauche. Dès lors, il est probable que l’information produite par tous ceux qui ne le sont pas soit considérée comme plus vraie par une plus grande part de la population. L’ouverture aux opinions permet d’améliorer la qualité des faits rapportés. »
C’est une excellente analyse que vous faites du milieu journalistique, et de plus vous avez le courage de l’écrire.
Je rajouterai que l’information produite par les « mass media » ne sera pas forcément plus vraie que celle des journalistes professionnels.
Par contre, elle sera plus pertinente ; et issue du terrain, collera vraiment aux préoccupations de chacun (qui n’ont pas les mêmes intérêts que ceux de « l’élite journalistique parisienne »).